
La 6e extinction massive du vivant se confirme: selon l’édition 2016 du rapport Planète Vivante du WWF, les populations d’animaux vertébrés ont chuté de 58 % entre 1970 et 2012, un chiffre catastrophique qui trouve ses origines dans notre empreinte écologique devenue insoutenable… Tous les deux ans, l’ONG WWF réalise une analyse scientifique de la santé de notre planète, du vivant et l’impact des activités humaines intitulé Rapport Planète Vivante. Le rapport 2016 s’intitule « risque et résilience dans l’Anthropocène », en référence à cette nouvelle « ère géologique » marquée par l’empreinte des activités humaines sur notre planète.
Pour mesurer l’évolution de milliers de populations d’espèces vertébrées partout dans le monde, le WWF s’appuie sur son Indice Planète Vivante (IPV), qui dresse l’état écologique de la planète.
Cette année, la Société zoologique de Londres qui le calcule a utilisé les données scientifiques collectées sur 14 152 populations d’animaux appartenant à 3 706 espèces vertébrées. Et les résultats sont une nouvelle fois catastrophiques: les populations de vertébrés, poissons, oiseaux, mammifères, amphibiens et reptiles, ont chuté de 58 % entre 1970 et 2012. La précédente estimation (rapport Planète Vivante 2014) faisait état d’une régression de 52 % des vertébrés de 1970 à 2010.
Le déclin se poursuit donc malgré la mobilisation, sans précédent, de la société civile et en dépit de la tenue régulière de grands sommets sur la Terre… Si nous ne faisons rien pour inverser la tendance, ce déclin pourrait continuer à s’aggraver jusqu’à atteindre 67% d’ici 2020, alerte le WWF. Le déclin de la biodiversité est tel que l’on parle maintenant de la sixième extinction massive du vivant sur Terre.
« Que la biodiversité poursuive sa chute, et le monde naturel que nous connaissons aujourd’hui s’effondrera d’un seul tenant. Nous dépendons totalement de la nature, que ce soit pour l’air que nous respirons, pour l’eau que nous buvons, pour la stabilité du climat, pour les aliments et les matériaux que nous utilisons, pour l’économie que nous faisons fonctionner, mais aussi, et c’est loin d’être secondaire, pour notre santé, notre inspiration et notre bonheur. Or, depuis des décennies, la communauté scientifique tire la sonnette d’alarme en affirmant que l’action de l’homme conduit directement la vie vers une sixième grande extinction. » avertit Marco Lambertini, Directeur du WWF-International.
Si les plantes et les animaux sauvages sont concernés, le nombre d’êtres humains victimes de la détérioration de l’environnement va également croissant. Pour que les systèmes vivants continuent à satisfaire nos besoins vitaux (un air respirable, une eau potable ou de la nourriture comestible), encore faut-il qu’ils conservent leur complexité, leur diversité et leur résilience. Rappelons que l’état de pollution de nos milieux est tel, que les eaux sont massivement chargées en pesticides et que l’air que nous respirons est officiellement cancérogène !
Le Rapport Planète Vivante 2016 s’appuie sur un second indicateur, l’Empreinte écologique, qui mesure l’aptitude de plus en plus limitée de la planète à subvenir aux besoins de l’humanité.
Le 8 août 2016, le « jour du dépassement », l’humanité avait déjà consommé l’ensemble des ressources que la planète ne peut renouveler en une année. En huit mois, nous avons émis plus de carbone que ce que les océans et les forêts ne pouvaient absorber en un an, nous avons pêché plus de poissons, coupé plus d’arbres, fait plus de récoltes, consommé plus d’eau que ce que la Terre aurait pu produire sur cette même période. Résultat : nous avons aujourd’hui besoin de l’équivalent de 1,6 planète comme la Terre pour maintenir l’équilibre écologique de notre planète.
En s’attaquant au capital naturel de la planète, l’humanité se met donc elle-même en danger puisque qu’elle dépend de l’état de santé des écosystèmes pour se développer et plus simplement pour survivre.
Le Rapport Planète Vivante 2016 met plus particulièrement l’accent sur l’impact de notre système alimentaire, l’un des premiers facteurs de dégradation des habitats et de surexploitation des espèces (surpêche par exemple), de pollution et d’érosion des sols. A elle-seule, l’agriculture occupe environ un tiers de la surface terrestre totale, est la cause de 80% de la déforestation mondiale et pèse pour près de 70 % de la consommation d’eau. Or, l’agriculture est aujourd’hui massivement orientée vers la production de viande, très gourmande en ressources, alors qu’il est tout à fait possible de s’en passer via un régime alimentaire végétarien voire végétalien.
Ainsi, une très forte proportion de terres agricoles (près de 80 %) est directement ou indirectement consacrée au bétail et à la production de viande, de lait et autres protéines animales (calculs basés sur FAO, 2015). Or, cette production d’animaux ne fournit que 17 % des calories et 33 % des protéines consommées par les êtres humains dans le monde (calculs basés sur FAO, 2015), indique le rapport Planète Vivante. Une aberration alors que près de 800 millions de personnes souffrent de malnutrition et que le nombre de personnes en surpoids ne cesse d’augmenter: 1,9 milliard, dont plus de 600 millions d’obèses (OMS, 2015).
Soulignons enfin le formidable gâchis alimentaire: un tiers de la production alimentaire est gâchée à cause des pertes enregistrées pendant la récolte, le stockage ou la distribution, mais aussi de la mise au rebut d’aliments périmés par les consommateurs: autant dire, un énorme gaspillage de capital financier, humain et naturel.