La prêtresse vaudou poursuit ses métissages blues-rock à travers son troisième album, Simido. La musique de Moonlight Benjamin, installée en France, se nourrit de multiples rencontres. Son prénom lui a été donné par un père pasteur protestant haïtien, qui l’a élevée dans une éducation stricte, après la mort de sa mère à sa naissance. Moonlight, le « clair de lune », pour signifier celle qui prêche, celle qui éclaire. La jeune fille découvre très tôt la musique à l’église. « Un mélange de variété haïtienne et de jazz. Mais c’est une cassette de Wawa et Azor qui m’a bouleversée ».
Moonlight quitte son village perdu dans les montagnes et grandit dans un orphelinat. Des années dont elle garde de bons souvenirs : « J’y ai reçu une ouverture d’esprit formidable. Je suis peut-être devenue la femme que je suis grâce à cette expérience ». Elle découvre le blues haïtien à la radio, dans des concerts et à l’église. La jeune femme participe à l’enregistrement de l’album de Tinès Salvant, qui fait d’elle sa protégée. La chanteuse rencontre également plusieurs écrivains haïtiens, ce qui l’incitera un peu plus tard à mettre en musique plusieurs textes de ses compatriotes dans son deuxième album Siltane.
En 2002, alors âgée de 31 ans, Moonlight Benjamin quitte pour la première fois Haïti direction la France afin d’y suivre une formation en techniques vocales, elle qui a appris à chanter en autodidacte. « La France m’est plus familière que les États-Unis par rapport à la langue et à l’histoire d’Haïti. J’y suis allée pour enrichir ma musique et la partager, pour fusionner les genres ». Elle y fera de nombreuses rencontres.
Elle découvre Toulouse et tombera amoureuse de la région et d’un Français. La jeune femme vit depuis à quelques kilomètres de la ville rose dans un bourg de 700 habitants. C’est dans le sud-ouest de la France qu’elle crée le groupe Dyaoulé Pemba, avec des musiciens locaux, qui sera Découverte du Printemps de Bourges en 2008. Les concerts, acoustiques et inspirés de la musique racine haïtienne la font voyager. De retour dans son village, Moonlight compose son premier album solo, Mouvman, chanté essentiellement dans la langue de Molière.
« J’ai été émerveillée par la société française : l’administration, la protection sociale, mais aussi la cuisine, la poésie, la musique… Je compose le matin en prenant un thé, parfois une idée me vient en faisant la cuisine, alors j’arrête tout et j’enregistre ».
Elle rencontre le saxophoniste Jacques Schwartz-Bart et le pianiste Omar Sosa, avec qui elle formera un trio de « jazz vaudou ». Car la chanteuse est devenue prêtresse vaudou quelques années plus tôt en Haïti. Loin des clichés occidentaux des zombies et des cérémonies de transe, elle explique : « C’est une forme de philosophie qui prône d’accepter les autres tels qu’ils sont, de faire avec l’univers. Un mode de vie qui permet de rester connecté à son âme. Je prône cela dans ma musique, l’éveil des consciences, condition de la liberté ».
Moonlight Benjamin rencontre le guitariste Matthis Pascaud, qui va façonner une nouvelle direction musicale. « Il a apporté le rock et le blues à mes deux derniers albums. Je construisais des rythmes et des structures mélodiques inspirés des musiques traditionnelles. Il y a du blues dans la musique vaudou, deux genres, dont les racines remontent en Afrique ».
Alors qu’elle délaisse un peu la musique populaire haïtienne, l’auteure et interprète choisit de ne chanter qu’en créole, une façon de rester connectée à ses origines. Siltane et Simido, le nom de ces deux derniers albums, sont des personnages que Moonlight Benjamin a créés, à qui elle demande pourquoi les rêves de liberté d’Haïti ont toujours été bafoués. Sa voix puissante et envoûtante chante les souffrances, mais porte aussi les espérances de son île.
On l’a parfois surnommée « la Patti Smith haïtienne ». Une personnalité qu’elle affectionne, « pas tant au niveau musical que par rapport à son engagement et à sa vision philosophique de la vie. D’autres artistes m’ont inspirée, comme Abbey Lincoln, Janis Joplin, Freddy Mercury ou Tina Turner, ils m’ont aidé à me construire. Ma famille musicale s’est élargie du blues des années 70 aux Black Keys ou plus récemment à Delgrès. » Programmée dans des salles et des festivals d’Europe et des États-Unis, Moonlight Benjamin aimerait désormais donner des concerts en Haïti.
Selon les fondateurs de la cybernétique, dont John McCarthy and Marvin Minsky, le terme intelligence artificielle désigne un comportement produit par une machine dont on peut raisonnablement estimer que, s’il avait été le fruit d’une action humaine, il aurait exigé de l’intelligence de la part de l’agent concerné.